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24 mai 2006

Deux attaques républicaines manquées

La troisième communication de la journée d'études sur l'histoire militaire des guerres de Vendée, présentée par l'abbé Chantreau, membre de la Société Archéologique et Historique de Nantes et de Loire-Atlantique, a porté sur deux attaques des troupes républicaines sur la ville de Legé, les 30 avril et 5 mai 1793.

Ces deux attaques se sont inscrites dans un plan d'ensemble et ne sont pas des actions isolées ; leur échec est digne d'intérêt. Les troupes républicaines sont commandées par des anciens officiers de l'armée royale. Les chefs des insurgés vendéens ont la même origine, la même formation et la même expérience, et parfois fraternisent avec eux, mais leurs troupes sont des paysans qui retournent à domicile après les batailles.

Les opérations que les armées républicaines ont à mener au sud de la Loire visent à maintenir l'ordre en pays insurgé, et elles évolueront ensuite en guerre de répression (Turreau) puis de pacification (Hoche). Il n'y a pas de jacquerie en Vendée, et les habitants ont initialement bien accueilli la Révolution ; mais les événements de la Révolution ont ensuite suscité la révolte. Dès 1792, la guerre ne fait plus de doute dans l'esprit de plusieurs dirigeants, et elle promet d'être cruelle, car ce sera une guerre de religion.

Legé est entré en révolte le 11 mars 1793, le lendemain de l'annonce de la levée de 300'000 hommes en France. Il s'agit d'une place importante, en plein pays insurgé, positionnée sur une colline mais non fortifiée, encadrée par des forteresses distantes ; elle se trouvait sur la route royale Nantes - Les Sables, avec deux chemins qui la traversaient, de sorte que tenir Legé permettait d'empêcher toute communication entre la côte et l'Ouest.

Les attaques de Legé se sont soldées par un échec. Dans la nuit du 29 au 30 avril, une colonne de 600 hommes - dont 40 cavaliers et 2 canons - part s'emparer de Legé ; mais le chemin n'a pas été assez reconnu, notamment le passage d'un gué. Le chef vendéen Charette a été averti de l'arrivée de la colonne républicaine sur des grands chemins par des paysans, et il prend position sur une hauteur dominant le gué des Boulains ; il dispose d'environ 1500 hommes. Les insurgés commencent par être bousculés par les républicains qui ont traversé, mais sont regroupés par Charette, puis parviennent à repousser les républicains qui laissent leurs 2 canons en prenant la fuite. Les causes de l'échec républicain sont l'absence de renforts, le chef du détachement prévu à cette fin ayant reçu le plan de bataille après le déroulement de celle-ci, mais aussi la reconnaissance insuffisante du terrain, et le fait que les troupes avaient parcouru 20 km avant d'arriver au gué.

Par la suite, Charette veut poursuivre l'ennemi mais doit affronter une révolte des paysans, qui ne veulent pas s'éloigner de leurs habitations, et une avancée sur Machecoul s'achève par le désordre et le repli face aux dragons républicains.

Le général Canclaux, arrivé le 1er mai, réunit dans l'intervalle les armées républicaines et préparent l'investissement de Legé par 4 colonnes différentes, chacun comptant entre 600 et 1300 hommes. Elles arrivent à Legé le 5 mai à 11 heures du matin, après un signal de l'attaque déclenché par deux salves de canons. La résistance est inexistante, et on renonce à faire des prisonniers, sinon des chefs ; 20 soldats républicains sont libérés dans l'hôpital. Dans l'après-midi, on renonce à poursuivre Charette et on décide de laisser une garnison de 300 hommes et 2 canons, mais la troupe se rend vite insupportable, malgré les ordres allant dans le sens inverse. Le jeudi 9 mai, la garnison quitte Legé, et le soir même Charette rentre à Legé où il choisit d'établir son quartier-général.

Commentaire du scribe : ces premières attaques infructueuses menées par des troupes régulières recherchant un combat frontal et décisif avec des troupes irrégulières résument les difficultés de la contre-insurrection ; difficulté à trouver l'ennemi et à le forcer au combat dans des conditions favorables, difficulté à connaître le terrain et à l'exploiter au mieux, difficultés à tenir le pays et à s'appuyer sur la population. L'application des manœuvres militaires conventionnelles, dans une telle situation, mène inévitablement à l'échec.

Publié par Ludovic Monnerat le 24 mai 2006 à 21:24

Commentaires

Ludovic:
Merci beaucoup pour ces précieux sommaires sur le Vendée. Je suis familier mais j'igornais l'ampleur de l'enjeux ainsi comment cette insurrection nous enseignent de leçons bien applicables dans nos jours.

Merci de nouveau

xavier

Publié par xavier le 25 mai 2006 à 17:50

Beau commentaire, colonel-scribe !
Cela fait penser à Napoléon en Russie en miniature.

Publié par FrédéricLN le 25 mai 2006 à 18:47