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4 septembre 2005

Une armée en déroute ?

C'est le jugement de mon camarade Variable sur son blog : l'armée suisse est en déroute, totalement rongée par le manque de discipline et la dilution de l'autorité, et cette déroute est parfaitement illustrée par l'aspect débraillé des jeunes conscrits qui circulent dans les gares durant les congés du week-end. Un jugement dont je ne peux accepter le caractère absolu et définitif, puisque je circule aussi en train et que je vois dans les gares des jeunes militaires rasés, uniformes et "en ordre", mais dont l'orientation générale est juste. Cela fait des années que les cadres se plaignent de la mauvaise tenue des soldats de milice suisses. Cela fait aussi des années qu'on loue leur efficacité lorsqu'un engagement doit être mené.

La question qui est posée est cependant la suivante : est-ce que cette armée en crise est capable de remplir toutes ses missions, y compris et surtout la mission de défense / sûreté sectorielle qui reste son apanage ? Au-delà de la transformation de la société helvétique, force est d'admettre - comme l'écrit Variable - que le manque de poigne de la hiérarchie est une cause de cette déroute qu'il perçoit. Le laxisme qui a été favorisé dans les années 90, lorsque les militaires ont essayé de plaire au lieu de se concentrer sur leur mission éducatrice, n'en finit pas de porter ses fruits vénéneux. Mes propres souvenirs m'amènent aujourd'hui à douter de l'efficacité même de l'instruction militaire.

Je pense cependant que les principaux responsables de l'armée sont pleinement conscients du problème, à force de constater les mêmes lacunes et les mêmes problèmes lors des visites à la troupe. Maintenir une armée sans menace immédiate et directe est toujours un défi pour n'importe quelle démocratie, et le demi-siècle vécu sur pied de guerre par l'armée suisse a fait croire qu'une telle posture allait de soi. Nous réapprenons aujourd'hui ce que nos aînés ont appris durant les années 20 et 30. Il faut juste espérer que les défis mortels que l'Histoire tôt ou tard va poser sur notre route ne nous prendront pas autant au dépourvu que par le passé...

Publié par Ludovic Monnerat le 4 septembre 2005 à 11:11

Commentaires

Bravo pour avoir vous aussi le courage d'avouer ce triste constat que de nombreux amis de notre armée de milice ont aussi fait.

Pour ma part, je pense avec beaucoup de tristesse que nous vivons les dernières années d'une système. Quand j'aurai échoué à défendre le système de milice, je voterai pour la suppression pure et simple de l'armée.

Publié par Ruben le 4 septembre 2005 à 12:57

"... Le laxisme qui a été favorisé dans les années 90, lorsque les militaires ont essayé de plaire au lieu de se concentrer sur leur mission éducatrice, n'en finit pas de porter ses fruits vénéneux... "

C'est un constat qui touche tous les milieux d'éducation, les familles, les lieux d'apprentissage ( écoles, sport, armée etc. ) On a transformé notre jeunesse en consommateurs ( le dernier groupe en date les enfants de 4 ans ) et on ne peut dire NON à un consommateur. Je serais curieux d'en apprendre à ce sujet qui est généralisé semble-t-il dans nos démocraties. Au Québec un étudiant disfonctionnel, on le jette dehors de l'école et on le réintègre à l'éducation des adultes en lui expliquant que là , les règles sont incontournables, qu'il devra se plier ou se débrouiller tout seul. Je ne vous dit pas quel genre d'études on lui offre aux Adulte...

Publié par Yves-Marie SENAMAUD le 4 septembre 2005 à 16:04

La solution pour éviter de voir déambuler une cohorte de débraillés dans les gares serait d'interdire la tenue militaire durant les permissions sauf à ceux qui s'engageraient par contrat à représenter dignement l'Armée et son Pays ( les avantages pécuniaires de transport, s'ils existent encore pourrait être à géométrie variable ) Une civilisation démocratique, mercantile et de consommation implique un usage raisonnable de la carotte et ne peut utiliser le bâton qui sera toujours mal vu et on connaît la chanson ;-)

Publié par Yves-Marie SENAMAUD le 4 septembre 2005 à 16:19

"C'est un constat qui touche tous les milieux d'éducation, les familles, les lieux d'apprentissage ( écoles, sport, armée etc. ) On a transformé notre jeunesse en consommateurs..."

c'est tellement vrai, d'autant plus quand on entend le chef de l'armée, le commandant de corps Keckeis, parler de ses "clients"... L'armée n'a rien à vendre à ses soldats !

Publié par lhd le 4 septembre 2005 à 17:04

Mon cher Ludovic,
J'ai simplement lançé le pavé dans la mare. Je suis bien conscient que la problèmatique est bien plus complexe que le simple constat que j'ai retransmis dan mon blog.
Il n'empêche qu'un tout petit peu de discipline n'est pas difficile à remettre en place.
IL SUFFIT DE LE VOULOIR ET DE L'ORDONNER!

Pour le reste, je suis entièrement d'accord avec ce que tu as écrit!

Même si ça me fait vraiment mal de voir ces zombies fumeurs de moquettes divaguer dans les gares... Quelle image!

Publié par variable le 4 septembre 2005 à 17:14

Lorsque le chat dort, les souris dansent...cela vaut aussi pour les soldats et recrues. Pour calmer les fumeurs de moquettes dans le train, il suffit que quelques officiers voyagent en 2ème classe. J'ai même pu constater qu'on pouvait faire un souper de companie dans une ER qui finissent de manière décente; cela a certes nécessité 9 officiers dans les couloirs, mais cela a fonctionné (et pourtant, la bière était offerte).

Comme les chats, les officiers ne devraient jamais fermer plus d'un oeil...

Publié par Reto le 4 septembre 2005 à 20:07

De toutes manières, les officiers ne dorment jamais.

Publié par Ruben le 4 septembre 2005 à 22:19

Je dois dire qu'un sergent de 1m90 pour 95 kilos avec une détermination de Razorback, ça aide aussi beaucoup!

Je connais des of qui au cours TIFLU en 1998 étaient au pieu avant les recrues... Les vieux sergents couchaient tout le petit monde et le matin sonnaient la diane!

Les temps changent, les sergents restent!

Je sens que ça va jazzer!

Publié par variable le 4 septembre 2005 à 22:23

J ai regarde la photos de ces 2 magnifiques soldats, deplorable...Mais je suis heureux que quelqu un denonce ces comportements qui ont, malheureusement, tendance a se generaliser.
Je rejoins ainsi totalement ce que dit mon camarade Ludovic. J ai fait mon ER en 1996 (ce n est pas quand meme bien loin..)et ce genre de manque de respect pour l uniforme existait certe, mais cela restait l exception. Je peux parler en connaissance de cause car l annee passee encore lors de mon cours de repet' (pardon SIF..), notre bat etait engage en faveur de la patrouille des glaciers, j en ai vu de toutes les couleurs..Avec mes autres camarades Plt nous avons passe une grande partie de notre temps a joue aux "controleurs-de-tenues-et-de-comportements"..

Publié par zingg christophe le 5 septembre 2005 à 3:05

« Pour ma part, je pense avec beaucoup de tristesse que nous vivons les dernières années d'une système. Quand j'aurai échoué à défendre le système de milice, je voterai pour la suppression pure et simple de l'armée. » (Ruben - plt Begert )

Position dogmatique, qui se base plus sur des considérations politiques ou idéologiques que sur une véritable réflexion orientée vers les besoins en matière de sécurité.
Un sondage paru dans Le Temps de samedi démontre que la population suisse est de plus en plus en faveur d'une armée de métier. Personnellement, je suis d'avis qu'un système mixte pourrait être intéressant (milice + professionnels).

Publié par Alex le 5 septembre 2005 à 9:19

J'adore quand vous vous mettez en position de donner des leçons, Alex. C'est rigolo, mais ça ne va pas chercher bien loin.

Publié par Ruben le 7 septembre 2005 à 18:31

« C'est rigolo, mais ça ne va pas chercher bien loin ». (Ruben)

J'ai un autre avis sur la question. Supprimer l'armée pour une question de professionnalisation de cette institution ne constitue pas une réaction très rationnelle ou raisonnable, mais démontre plutôt un attachement immodéré pour un concept. Autrement dit, ce point de vue limite les possibilités permettant de réformer l'armée pour la rendre plus efficace. Si vous désirez vraiment aller plus loin, exposez ici les arguments en faveur d'une suppression de l'armée dans le cas de sa professionnalisation.

Alex

Publié par Alex le 8 septembre 2005 à 13:14

Le tout est de savoir à quoi sert l'armée.
Pour moi, elle ne se suffit pas à elle-même : elle se prépare à défendre quelque chose. Il lui faut donc quelque chose qui vaille la peine d'être défendu.

Contrairement à une milice, une armée professionnelle constitue une arme dans les mains de l'état potentiellement engageable contre le peuple, ou pour opprimer ce dernier. Par ailleurs, les citoyens-soldats forment un juste contre-pouvoir face aux éventuelles forces d'oppression que constituent les différents corps armés déjà aux mains de l'état.

Comme ma pensée (et vous avez parfaitement le droit de ne pas la partager!) rejoint complètement celle des pères fondateurs américains sur ces sujets, en perdant la milice, nous perdons la pleine démocratie, et nous n'avaons donc plus rien qui vaille la peine d'être défendu.

CQFD

P. S. Vous ne serez pas d'accord, et j'ai bien peur que nous ne soyons inconciliables sur le sujet. Cela dit, j'apprécie toujours vos remarques parfois piquantes.

Publié par Ruben le 8 septembre 2005 à 22:19

" Ruben " "... en perdant la milice, nous perdons la pleine démocratie... "

Je vous suis totalement dans ce constat mais j'apporterais humblement une petite nuance. L'armée professionnelle ne présente pas le même danger que l'Armée de métier beaucoup plus nombreux en effectifs et qui permet la survie des dictatures. L'Armée de milice ( ou de conscrits ) est indispensable pour vivre en démocratie et entraver les prises de pouvoir par des putschs qui ne sont pas toujours apparents ou spectaculaires. Après la professionnalisation de l'armée il faudra revoir le rôle du Citoyen soldat du futur.

Publié par Yves-Marie SENAMAUD le 10 septembre 2005 à 2:14