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24 août 2005

Une lutte d'espèces

Cette colonne d'Austin Bay sur les activités de la Combined Joint Task Force (en langage militaire suisse romand : force de circonstance interforces et multinationale) sous commandement américain déployée dans la Corne de l'Afrique est intéressante à bien des égards. Elle montre la préoccupation du Pentagone de ne pas laisser de vide stratégique à la mouvance islamiste, de produire un effet d'interdiction par la présence d'un contingent réduit mais polyvalent, d'exercer également une certaine dissuasion par le doute entretenu sur les activités et les capacités de ce contingent. Cependant, le point le plus important me semble le fait que la plupart des efforts déployés par les Etats-Unis avec ces activités militaires, dans cette région comme dans plusieurs autres, consiste à préserver et renforcer les nations qui y existent.

Il faut se rendre à l'évidence : nous sommes entrés de plain pied dans une époque où les Etats, menacés dans leur intégrité notamment par la fragmentation identitaire, par l'essor des espaces virtuels et par le naufrage budgétaire, sont obligés de venir au secours les uns des autres. A commencer par le plus puissant d'entre eux. En prenant du recul, on peut ainsi voir une gigantesque lutte se dérouler sur tous les continents entre les Etats-nations et d'autres espèces sociétales, qui d'ailleurs prend souvent l'apparence d'une lutte entre l'ordre et le chaos. Et les organisations nationales comme internationales ont naturellement tendance à défendre leurs pairs, à garantir leur existence par des mesures sécuritaires ou financières, voire même à créer de nouveaux Etats-nations là où leurs prédécesseurs se sont effondrés. La multiplication des missions onusiennes symbolise ce phénomène.

En soi, pour le citoyen que je suis, faire des efforts pour la survie des Etats sous leur forme actuelle relève de l'évidence ; une armée n'aurait d'ailleurs guère de sens ou de légitimité sans un territoire à protéger, sans une population à défendre. Il ne faut pas toutefois une créativité débridée pour imaginer d'autres identités (encartées ou non), d'autres appartenances, d'autres loyautés. Aujourd'hui déjà , une entreprise privée, un réseau criminel ou une mouvance idéologique qui offrent des services quasi étatiques, dans des domaines tels que la santé, l'éducation, le logement, le sport ou l'emploi, ont certainement bien plus de légitimité et d'influence que des Etats instables et corrompus. L'essor du Hezbollah au Liban ou du Hamas dans les territoires palestiniens sont à cet égard des exemples aussi intéressants qu'inquiétants. Est-ce là une perspective d'avenir, un augure des structures sociétales de demain ?

Vaste question, à laquelle je ne tenterai pas ici de répondre. Ce qui me paraît en revanche certain, c'est que la construction ou la préservation des nations n'est pas obligatoirement l'unique voie vers la paix, la prospérité et la stabilité - même si nous avons tendance à le croire instinctivement.

Publié par Ludovic Monnerat le 24 août 2005 à 21:06

Commentaires

Ne pas oubliez que l'immense majorité des Etats d'Afrique, a part l'Egypte, l'Ethiopie, le Maroc et quelques autres sont une consctruction artificiel avec des frontiéres faites au cordeau dans les antichambres des capitales Européennes.

Un nation ne se construit pas en moins de 50 ans comme la démontrer l'histoire de notre continent.

Les structures étatiques et le semtiment national sont beaucoup plus fragile qu'en Europe.

Publié par Frédéric le 24 août 2005 à 21:40

"! Les structures étatiques et le sentiment national sont beaucoup plus fragile qu'en Europe!"

Je ne suis pas sure de ça. Je pense que c'est beaucoup plus complexe et j'aimerais savoir le sentiment des Suisses sur leur nation qui vue de l'extérieur semble être un non sens, un défi à l'équilibre et une réalisation assez rapide malgré tout. Je crois que l'idée du Citoyen soldat dans un environnement assez homogène, favorise un sentiment " national " qui peut être exacerbé par des attaques extérieures ou conforté par une longue stabilité. L'Afrique n'a pas beaucoup bougée dans ses frontières " artificielles " et les conflits sont très semblables à ceux qu'a connu l'Europe ( dynastiques, ethnoreligieux et commerciaux ).

Publié par Yves-Marie SENAMAUD le 24 août 2005 à 22:49

Yves-Marie, pour l'Afrique, je ne suis pas sûr des ressemblances:
http://www.frontpagemag.com/Articles/ReadArticle.asp?ID=19189

Publié par al le 24 août 2005 à 23:02

" al " "... je ne suis pas sûr..." et moi non plus et j'aurais du élaborer un peu plus. L'époque n'est pas la même mais la trame de l'histoire est semblable si l'on regarde l'époque Poste-Romaine ( en fait la décolonisation ), le nationalisme renaissant dans des états largement définis par le tracé des Romains etc. Ce que je voulais dire c'est que l'Afrique ne réagit pas différemment de l'Europe naissante. Bien sure on peut s'étonner qu'il n'y a aucun pays d'Afrique qui présente un boum économique comme la Corée du sud par exemple mais le colonialisme n'était pas le même sur ces deux continents et était souvent réduit à de simples comptoirs en Asie. Les humains ont plus de ressemblances que de différences. Religions, Royaumes, commerce, guerre, génocide, nationalisme, agriculture, élevage etc. C'est Kif Kif, même si notre regard est très souvent empreint de paternalisme pour l'Afrique ;-)

Publié par Yves-Marie SENAMAUD le 25 août 2005 à 6:29

Un allié violent

Le terrorisme entrave l'Islam radical

http://fr.danielpipes.org/article/2892

Publié par Yves-Marie SENAMAUD le 27 août 2005 à 1:01