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2 janvier 2005

ONU : le silence complice

Voici plus de 2 semaines que le Times de Londres a publié un article dévastateur pour la réputation et la crédibilité des Nations Unies, en résumant les actes illicites et scandaleux commis par le casques bleus et les fonctionnaires onusiens au Congo. Les enquêtes en cours avaient alors révélé au moins 150 cas de méconduite flagrante : viols, pédophilie, pornographie, etc. Des cassettes pornographiques impliquant des mineurs ont ainsi été tournées par des employés internationaux ou des soldats engagés dans la mission.

Pourtant, cet article éloquent - et fondé par plusieurs sources distinctes, dont des rapports internes de l'ONU - a été étonnamment ignoré par le reste des médias occidentaux. Alors que ceux-ci avaient orchestré une véritable campagne lors de la révélation des maltraitements commis dans la prison irakienne d'Abu Ghraib, les actes à la fois plus nombreux et plus graves commis par l'ONU au Congo sont recouverts d'un manteau de silence. L'organisation elle-même refuse d'en dire davantage, et notamment de dénoncer les contingents coupables des pires exactions.

Une recherche sur les informations de Google montre ainsi que la couverture médiatique s'est limitée à donner la parole aux représentants de l'ONU sur les accusations de viols rendues publiques dès la mi-décembre. Aucune enquête subséquente, aucune remise en cause des déclarations des dirigeants onusiens n'ont eu lieu, sauf dans quelques médias américains conservateurs qui combattent ouvertement l'ONU (on peut citer un éditorial du WSJ - accès payant - le 29 décembre). En d'autres termes, les explications onusiennes et les promesses de réforme ont été acceptées comme parole d'évangile par les rédactions.

Ces jours-ci, le scandale de l'ONU a été largement mis entre parenthèses en raison de la catastrophe survenue en Asie du Sud, même si l'organisation montre comme souvent son aptitude restreinte à conduire des opérations complexes, ainsi qu'en témoignent les engorgements logistiques signalés aujourd'hui. Mais le silence complice des médias à l'endroit de l'ONU sera tôt ou tard rompu, en particulier lorsque les cassettes tournées par les violeurs et les pédophiles au Congo seront rendues publiques. Les convictions doivent tôt ou tard s'incliner devant la réalité.

Naturellement, cet épisode contribue encore à réduire la crédibilité des rédactions quant à leur capacité et leur volonté à relater de manière objective la totalité des faits.

COMPLEMENT : Pour obtenir une vision critique de la manière avec laquelle l'ONU tente de gérer la catastrophe humanitaire en Asie du Sud, les derniers billets de Belmont Club sont une référence.

COMPLEMENT II : L'ONU semble avoir pris l'habitude de revendiquer comme siennes les activités des contingents militaires américains et australiens à Sumatra, alors même qu'elle n'a rien à voir avec celles-ci. Ce comportement a de quoi interpeller, comme le montre le blog tenu par des membres du Département d'Etat américain, Diplomad.

COMPLEMENT III : D'après le New York Times de ce jour, Kofi Annan est parfaitement conscient de la crise mortelle que traverse l'ONU et demande des conseils avisés sur la manière d'en assurer la survie. Il faut dire que la pression est croissante aux Etats-Unis pour un retrait américain de l'ONU...

Publié par Ludovic Monnerat le 2 janvier 2005 à 11:47