« Bonne et heureuse année 2005 ! | Accueil | ONU : le silence complice »

1 janvier 2005

L'aide militaire en Asie du Sud

Les effets dévastateurs du tsunami en Asie du Sud ont rapidement nécessité l'intervention de plusieurs forces armées, qui disposent de capacités cruciales en matière de logistique et de reconnaissance. Les armées des pays touchés ont naturellement été appelées à se déployer dans des régions coupées du monde, comme au Sri Lanka et en Indonésie, afin de venir en aide aux survivants. Pourtant, leurs capacités limitées en regard des standards en la matière laisse un très large rôle aux nations occidentales.

L'Australie a été la première à intervenir, et son Ministère de la Défense a d'ailleurs créé une page spécifique pour décrire les efforts entrepris. L'armée australienne a ainsi déployé 7 avions de transport C-130 (dont 1 fourni par la Nouvelle-Zélande), 1 avion de transport Boeing 707 et 1 avion léger Beech 350 dès le 28.12, ainsi que plusieurs installations de purification d'eau et du personnel spécialisé dans le génie et la logistique.

Après un accord international qu'il serait fort intéressant de connaître, l'Australie a décidé de se concentrer sur l'île de Sumatra, en Indonésie, qui comprend la péninsule d'Aceh en proie depuis une année et demi à un conflit de basse intensité entre indépendantistes et forces de sécurité indonésiennes. Les moyens supplémentaires déployés par l'Australie comprennent un hôpital de campagne de 55 lits (dès le 2.1), 4 hélicoptères de transport UH-1 (dès le 3.1) et le navire amphibie HMAS Kanimbla, qui sera positionné au large d'Aceh dès le 14.1 en guise d'appui logistique avancé, voire d'élément de commandement. Au total, les effectifs engagés par l'Australie vont dépasser les 1000 militaires.

Les Etats-Unis, par le biais de leurs moyens prépositionnés dans le Pacifique et l'océan Indien, ont la capacité d'intervenir massivement. Une force de circonstance a été formée pour l'occasion, la Joint Task Force 536, sous le commandement de la 3e Force Expéditionnaires de Marines, et elle a établi son commandement sur la base d'Utapao, en Thaïlande. Dès le 29.12, 9 avions de reconnaissance maritime P-3 Orion ont été déployés pour la reconnaissance et la recherche de personnes, alors que 10 avions de transport C-130 ont commencé à livrer des marchandises de première nécessité, comme l'eau potable et les médicaments. Au moins 4 ravitailleurs KC-135 sont également engagés pour transporter des palettes de matériel. Tous ces moyens sont basés au Japon et à Guam.

Sur le plan maritime, le groupe aéronaval centré autour du porte-avions USS Abraham Lincoln est arrivé le 31.12 au large d'Aceh, et emploie ses moyens aériens - dont 12 hélicoptères de transport - pour la recherche et sauvetage. De plus, 7 navires de transport prépositionnés à Diego Garcia ou à Guam devraient arriver à la fin de la semaine prochaine à proximité des zones les plus touchées avec une grande quantité de matériel, chacun emmenant un équipement de purification d'eau capable de produire près de 400'000 litres par jour. Enfin, le groupe d'assaut amphibie centré autour de l'USS Bonhomme Richard devrait arriver le 6.1 au large du Sri Lanka ; ses 25 hélicoptères seront utiles dans le transport, mais ce sont surtout ses 2100 Marines embarqués - la 15e Unité Expéditionnaire de Marines - qui fourniront la principale contribution. Au total, les Etats-Unis vont donc employer entre 10'000 et 12'000 soldats pour cette mission.

Les pays européens sont naturellement moins impliqués, en raison de leur éloignement par rapport à l'Asie du Sud. Malgré cela, la France a déployé dès le 27.12 un avion de transport Airbus A-310 pour emmener du personnel et du matériel, puis ramener des citoyens français en détresse, mais aussi un avion de reconnaissance Atlantique 2 basé à Djibouti pour la recherche de personnes ; d'autres moyens ont été mis en alerte, notamment dans le transport aérien.

L'Allemagne, pour sa part, a engagé 3 Airbus A-310 - dont 2 en version sanitaire - pour le rapatriement de ses citoyens et transporté un grand volume de matériel. Elle déploie également le navire d'appui logistique Berlin, qui dispose de capacités dans le domaine sanitaire (45 lits), du ravitaillement (purification d'eau à raison de 25'000 litres par jour) et du transport aérien (2 hélicoptères Sea King). Ce navire était précédemment engagé dans le Golfe d'Oman au profit de l'opération Enduring Freedom.

La Grande-Bretagne, enfin, déploie une frégate et un navire logistique dans la région, où ils seront opérationnels dès le 4.1, ainsi qu'un avion de transport lourd C-17.

Ces engagements militaires d'aide humanitaire sont aujourd'hui une pratique habituelle, même si l'ampleur de la catastrophe accroit leur importance ; les troupes américaines du Pacifique sont d'ailleurs rentrées le 23.12 d'une mission de plusieurs jours aux Philippines, après les dégâts considérables entraînés par de violentes intempéries. C'est le principe même des Forces armées - se tenir prêtes à agir dans des contextes et face à des dangers divers - qui les rend aptes à remplir ponctuellement ce type de mission. Lorsque toute l'infrastructure nécessaire à la vie ordinaire s'effondre, les éléments capables de fonctionner dans une situation extraordinaire sont naturellement de première importance.

Une autre dimension vient cependant s'ajouter à cette utilité pratique autant qu'économique : l'impact politique de ces missions. Les promesses de dons et la solidarité publique sont dignes d'éloges, mais la présence sur le terrain de militaires engagés jour et nuit dans des tâches vitales au profit de populations démunies possède une valeur stratégique propre. Le déploiement militaire massif des Etats-Unis est une manière opportune de montrer que sa puissance peut aider et sauver plus que toute autre dans des circonstances dramatiques. Les images et vidéos mises en ligne par l'Australie participent d'une même intention.

COMPLEMENT : Précisons que le navire australien HMAS Kanimbla sera essentiellement engagé dans des travaux du génie en plus de la logistique. L'Australie planifie par ailleurs un engagement militaire à long terme dans la reconstruction.

COMPLEMENT II : Le dispositif militaire américain se précise, comme l'indique ce communiqué : le groupe amphibie Bonhomme Richard devrait plutôt être engagé autour d'Aceh, et arrive aujourd'hui à destination, alors que des avions de transport lourds C-17 sont également mis à disposition de la JTF.

COMPLEMENT III : La France a décidé d'engager également des navires en déployant dans la région le porte-hélicoptères Jeanne d'Arc et la frégate Georges Leygues.

Publié par Ludovic Monnerat le 1 janvier 2005 à 15:29

Commentaires

Un des responsables des Nations Unies craint un "emboutaillage logistique" et reclame des portes hélicoptéres et des avions cargos C-130 et et C-17

Les marines Indiennes et Thaie ont des portes aéronefs, sont ils en mission de secours ?

Publié par Frédéric le 1 janvier 2005 à 21:59

A ma connaissance, le seul porte-avions indien - le Viraat, soit l'ex-HMS Hermes des Malouines - a subi des avaries qui l'ont condamné à rester en cale sèche l'an passé. L'Inde n'aura une capacité aéronavale durable que la prochaine décennie, lorsque le porte-avions acheté aux Russes (le Gorschkov) et celui construit actuellement en Inde seront opérationnels.

Quant à la Thaïlande, son petit porte-avions - le Chakri Nareubet - est effectivement engagé actuellement en mer d'Adaman.

Publié par Ludovic Monnerat le 2 janvier 2005 à 9:50