« Les robots et le combat | Accueil | Alerte média : La Liberté »

28 janvier 2005

Irak : un retrait éminent

La presse occidentale a souvent tenté de montrer la population irakienne sous l'angle d'un rejet absolu de la coalition, et on peut encore lire ou entendre très régulièrement le terme d'occupation alors même qu'une résolution du Conseil sécurité de l'ONU (1546) a légalement mis un terme à celle-ci. Un article du Christian Science Monitor paru aujourd'hui met cependant le doigt sur le sentiment majoritaire de la population à cet égard :

"Iraqis are struggling with exactly the same paradox," adds the diplomat. "They want the multinational forces to leave, but ask them if they want them to leave tomorrow, and they say 'no.' "

Les forces de sécurité irakiennes, qui depuis l'automne 2003 sont plus nombreuses et subissent davantage de pertes que les forces de la coalition, ne sont pas encore en mesure de faire face seules à la guérilla sunnite : on ne peut pas demander à un policier à la fois de lutter contre la criminalité et de se battre comme un soldat, alors que la formation de la nouvelle armée irakienne s'est faite bien plus lentement que prévu par le Central Command. Par conséquent, c'est dans ce sens qu'il faut interpréter les discussions anglo-américaines sur une "stratégie de retrait" : la stratégie de contre-insurrection actuelle sera poursuivie, et les forces coalisées maintiendront leur présence pour l'accomplir.

Cette analyse publiée par USA Today montre en effet que la stabilisation de l'Irak exige avant tout la prolongation, et parfois l'intensification, des efforts produits. Les expériences faites après la Seconde guerre mondiale sont une indication intéressante :

American efforts in postwar Europe practiced what military planners called the "disease and unrest formula." They outlined three tasks to keep a defeated nation from chaos: (1) avoiding a humanitarian crisis; (2) setting up a legitimate government; (3) establishing domestic security forces.
Security took the longest, but by 1948, the government [of Austria] could stand by itself.

De toute évidence, les élections qui auront lieu dans 2 jours constituent une étape essentielle de tout processus de stabilisation, et un succès stratégique pour les Etats-Unis. Mais il est probable que ceux-ci devront encore contribuer longtemps à la consolidation de leurs succès pour empêcher leurs adversaires de reprendre l'initiative. Autrement dit, tous les discours souvent recyclés sur un plan de retrait (on parlait déjà de retrait imminent en novembre 2003...) servent un intérêt politique en terme de perception publique, et ne correspondent pas à la réalité stratégique.

Il me paraît probable que les Forces armées américaines soient encore présentes en Irak dans 10 ans, avec un volume certes fortement réduit, mais en ayant maintenu une capacité d'intervention au service des Gouvernements irakiens successifs. Nous verrons...

Publié par Ludovic Monnerat le 28 janvier 2005 à 8:45