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12 février 2010

Killing zone : la mort au combat en Grèce ancienne

La première communication est présentée par le professeur Pierre Ducrey, professeur honoraire de l'Université de Lausanne.

Par « killing zone », on entend l'espace de quelques mètres ou centimètres qui sépare deux combattants à l'arme blanche jusqu'au choc ; mais cela décrit aussi les quelques secondes séparant les avions détournés le 11 septembre 2001 de l'impact sur les tours du World Trade Center, ou les quelques secondes séparant le camion bourré d'explosifs le 23 octobre 1983 du cantonnement des Marines américaines pris pour cible à Beyrouth. A la différence que de nos jours, certains clans, groupes ou réseaux ne recherchent aucune protection et comptent au contraire sur le sacrifice du combattant, ce que constitue un changement de paradigme.

Un autre parallèle peut être tiré entre l'histoire antique et l'époque contemporaine : alors que les Grecs avaient pour coutume de massacrer les hommes et d'emmener en captivité les femmes et les enfants lors de la prise d'une ville ayant refusé de se rendre, la ville de Srebrenica a subi le même sort en 1995, lorsque quelque 8000 hommes ont été massacrés par les troupes serbes bosniaques. L'imagerie antique montre clairement de tels massacres, ainsi que la réduction à l'esclavage des non combattants. Cette violence extrême faisait partie des us et coutumes.

C'est cependant bien le combat des phalanges grecques, visant à l'anéantissement des troupes adverses (y compris lorsqu'une phalange s'oppose à une autre phalange) et s'avançant en ordre rangé au son de la musique, qui incarne bien le choc à l'époque antique. Le bataille, qui se déroule à coups de lances puis d'épée, produit bien plus de blessures sanglantes que l'historiographie ne l'a souvent dit. Ces combats très violents finissent d'ailleurs par montrer leurs limites, parce que la recherche d'autres approches tactiques aboutit à la multiplication des armes de jet (le feu) et à la recherche de situations plus favorables (la manœuvre), ce qui rendra finalement caduque la phalange grecque.

Publié par Ludovic Monnerat le 12 février 2010 à 14:41