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22 septembre 2007

Le point faible des "contractors"

Intéressante évolution de la situation en Irak : les entreprises privées de sécurité, qui bien souvent déploient des formations militaires stipendiées, montrent leurs limites et leurs vulnérabilités stratégiques. La polémique entoure une société telle que Blackwater depuis plusieurs années, et les récents remous dus à une fusillade moins discrète que d'autres ne changent pas fondamentalement l'aspect du problème. D'ailleurs, le fait que les équipes de Blackwater ont repris leur mission au profit des diplomates américains montre bien la dépendance de la première puissance mondiale envers les sociétés que ses contrats ont rendu florissantes. Pourtant, une nouvelle réalité pénètre désormais les esprits : le fait que l'emploi durable de telles sociétés devienne en soi contre-productif.

Le type d'adversaire décentralisé et chaotique que les États-Unis notamment affrontent en Irak est intrinsèquement voué à une méthode de combat génétique, subissant la sélection : toutes les actions possibles, même les plus absurdes (tentative d'attentat suicide à pied face à un char de combat, par exemple), sont nécessairement tentées au moins une fois, et les plus efficaces - comme celles offrant les meilleures chances de survie - sont identifiées, retenues et perfectionnées. C'est d'ailleurs ainsi que les pertes terribles subies face aux Forces armées américaines et à leurs auxiliaires ne sont pas en soi un indice d'insuccès (à la différence de leurs effets sociétaux) : elles indiquent également des pratiques empiriques en cours à une vaste échelle, dont peut fort bien émerger une approche payante. Comme celle consistant à combattre des sociétés privées honnies de la population locale.

Après 4 ans de conflit non conventionnel, il est en effet clair que l'approche directe face aux militaires américains ne mène pas au succès (même si les médias occidentaux ne cesse depuis le début de gloser sur la prétendue "défaite" de ceux-ci) : l'apprentissage progressif de la contre-insurrection a permis aux Forces armées U. S. de préserver et de développer les effets multiplicateurs, dans la société irakienne, dont dépend le succès de leur action. Par ailleurs, le fait de combattre les alliés des Américains - c'est-à -dire avant tout des Irakiens n'ayant guère d'autre choix rationnel - s'est rapidement retourné contre ceux qui ont usé et abusé de cette méthode, et notamment les islamistes irakiens et étrangers. Les évolutions positives annoncées récemment par le commandement américain sont en partie la conséquence de cet échec. Toutefois, certains alliés des Américains sont des cibles rentables et acceptables : les soldats stipendiés de Blackwater et consorts.

La mentalité du "contractor" venu faire une rotation en Irak ou ailleurs est en effet le plus souvent à l'opposé de la contre-insurrection : il vient pour faire du profit, considère tous les locaux comme des menaces potentielles, ne se fie qu'à ses propres collègues (et encore, d'abord ceux issus de son ancienne tribu militaire ou civile), et donc se fout éperdument de l'impact qu'il aura au-delà du court terme. Derrière les prestations sécuritaires vantées par les privés se cache une vision au microscope de la sécurité, perçue dans le simple rapport de force tactique découlant de l'emploi de petites unités. Autrement dit, une grande part des sociétés de sécurité ont une approche contraire aux intérêts à moyen et à long terme de leurs clients, et leur incapacité à se fondre dans leur environnement de travail en fait un symbole contre-productif. Les attaquer est donc l'assurance d'en tirer parti : leur infliger des pertes est tout aussi positif que les forcer à combattre et à outrepasser leur rôle.

Cette soudaine révélation d'une vulnérabilité stratégique ne signifie pas la fin des armées privées en gestation, mais elle annonce déjà leur mutation, la nécessité d'évoluer au rythme des mesures et contre-mesures propre à n'importe quel conflit. Quitte à laisser au rebut des perceptions trop ternies, comme Executive Outcomes hier et peut-être Blackwater demain, pour renaître sous une autre forme, au gré des transferts toujours rapides de personnel et de savoir-faire...

Publié par Ludovic Monnerat le 22 septembre 2007 à 17:19

Commentaires

L'existence et la richesse de ces sociétés privées n'est pas due à la faiblesse des forces USA.
Mais bel et bien à la cécité et au jemenfoutisme du gouvernement USA qui en réduisant les bénéfices acquis par contrat de ses militaires (retraite, médical etc)* trouva ainsi le fric pour faire générer des bénéfices à leurs copains quand ce n'est pas à eux même.

Tout mercenaire coûte au contribuable US plusieurs fois plus qu'un soldat, coûts qui s'originent d'un côté par des bénéfices exorbitants et d'autre part d'une logistique qui doit refaire ce qui existe déjà dans les forces armées.

C'est le coup des tournevis à 1000$ des années '80 refait en grande échelle.


* j'en connais personnellement qui ayant servi une vingtaine d'année voient leur couverture sociale se réduire progressivement, j'en avais déjà parlé ici ... mais dire ces choses en 2005 ... ;-)

Publié par Mikhaël le 22 septembre 2007 à 19:29

@ Mikhael : faux, les privés coutent moins cher : économie de formation / équipement / logistique / gestion.

@ Ludovic Monnerat : 3 choses :

1 : au pro rata d' hommes déployés, qui commet le plus de bavures : privés ou troupes US ?

2 : vous dépeignez les motivations des privés, en quoi diffèrent-elles de celles des militaires ?

3 : pensez-vous que le mode opératoire "profil haut" soit généralisable à la majorité des SMP ? Comment donc se fait-il que les SMP européennes ne se soient jamais faites remarquer de la sorte ?

Votre article décrit bien plus le point faible d' une façon de travailler que le rôle fondamental des SMP. Et comme d' habitude la façon de travailler dépend de la culture.

Publié par Luc B le 22 septembre 2007 à 19:56

A Luc B : vous avez entièrement, mes propos portaient exclusivement sur les compagnies américaines dont Blackwater est la plus importante, et qui emploient avant tout du personnel américain (ainsi que quelques rescapés d'escadrons de la mort sud-américains...) avec une culture afférente.

Maintenant, je pense que ma perspective générale était justifiée par la domination américaine sur le marché actuel des sociétés militaires privées.

Publié par Ludovic Monnerat le 22 septembre 2007 à 22:17

@ Luc B

Pour la compagnie en question, la formation étant fournie par l'armée aux frais du contribuable ... c'est presque tout du bénéfice. Si on considère que le profil recherché étant des paras en hauts, recon et autres troupes d'élites on peut bien imaginer ce que ça a du etre le coût total d'entrainer un béret vert (sans compter le coûts de ceux qui n'ont pas réussi).

C'est le vieux discours de la privatisation, on rend public les couts et on privatise les profits.

Si on considère que chaque dollar dépensé par une boite privée doit faire du bénéfice, ce qui n'est pas le cas de l'armée ... on a vite fait de voir comment une heure d'hélico coute plus cher dans le privé. L'es techniciens du privé touchant des salaires oh combien plus élévé d'un caporal ou d'un sergent spécialiste ... qui de plus est commandé en zone de guerre et auquel on n'a pas du payer un salaire super.

Au moment d'envoyer les troupes (avec raison) en Afghanistan et en Iraq, le gouvernement donna des coups de ciseaux dans les bénéfices aux militaires.

Une des personnes que je connais s'est vu dire "il y a eu des coupes, sarge, tes lunettes tu te les paies toi-même" et c'est un des chançards qui n'a pas besoin d'autre chose plus fondamental.

L.M connaît ma position, la lutte au terrorisme est fondamentale, mais la façon de la mener a été ... heummm ... du genre les tartes que font les vaches dans vos alpes.

Si la 2eme guerre mondiale avait été conduite ainsi ... on ne serait pas là à discuter.

Publié par Mikhaël le 22 septembre 2007 à 22:51

A la différence près que la 2e guerre mondiale n' était pas un conflit de 4e génération comme l' Irak, ou tout est question de conquête des populations. Dans ce contexte, après la très courte phase d' invasion / conquête de terrain, le job de soldat devient le même que celui d' agent de sécurité (excepté une ou deux fois l' an quand il faut reconquérir une ville).

Ensuite, les privés sous contrat, pour ceux qui ont un passé militaire, n' ont plus d' obligations envers l' armée et feraient un autre job dans le civil s' ils n' étaient pas là . Exit l' argument des frais du contribuable pour leur formation. Seule exception : les rares déserteurs de la légion s' étant retrouvés là -bas ;-)

Le gros problème pour les armées est de se voir saignées à blanc de leur personnel qualifié. Et j' espère bientôt dépossédées aussi de leurs missions et être accablées d' autant de mépris que le mépris de l' intelligence érigé en valeur militaire ultime qu' elles nous assènent depuis toujours.

"La guerre est une chose trop sérieuse pour être confiée à des militaires". Les militaires sont les premiers à acquiescer.

Publié par Luc B le 23 septembre 2007 à 0:31

A Luc B

De toute évidence, vous êtes en faveur des sociétés de sécurité privées. Pourtant, vous n'exposez pas véritablement les motifs de votre préférence.

Pour ma part, j'y suis plutôt contre ce modèle car :

o Les employés représentent avant tout la société pour laquelle ils travaillent et non pas l'Etat qui les paie. Dans ce cadre, on peut effectivement estimer qu'il puisse y avoir des conflits d'intérêts ou des différences de motivation. La question des bénéfices que doivent produire ce genre de société est aussi un élément pertinent.
o Que fait ce genre de société, lorsqu'un conflit prend fin. Elle cherche de nouveaux mandats auprès des politiciens ou essaie de prolonger son action sur les anciens théâtres d'opérations ? N'y a-t-il pas aussi ici le risque de collusion entre les intérêts d'un Etat et ceux des sociétés en question ?
o Rapport coût / efficacité ? A part la souplesse et la discrétion de ces sociétés, est ce que ces dernières ont véritablement des avantages par rapport à une armée régulière ?
o La question de contrôle est aussi importante, surtout lorsque du personnel est employé en dehors des frontières du pays mandataire. Ce genre de sociétés sont-elles vraiment compatibles avec nos institutions démocratiques ?

J'ai l'impression que ces questions démontrent la limites des prestataires privés. Avez-vous d'autres réponses ??

Publié par Alex le 24 septembre 2007 à 10:00

A Luc B

De toute évidence, vous êtes en faveur des sociétés de sécurité privées. Pourtant, vous n'exposez pas véritablement les motifs de votre préférence.

Pour ma part, j'y suis plutôt contre ce modèle car :

o Les employés représentent avant tout la société pour laquelle ils travaillent et non pas l'Etat qui les paie. Dans ce cadre, on peut effectivement estimer qu'il puisse y avoir des conflits d'intérêts ou des différences de motivation. La question des bénéfices que doivent produire ce genre de société est aussi un élément pertinent.
o Que fait ce genre de société, lorsqu'un conflit prend fin. Elle cherche de nouveaux mandats auprès des politiciens ou essaie de prolonger son action sur les anciens théâtres d'opérations ? N'y a-t-il pas aussi ici le risque de collusion entre les intérêts d'un Etat et ceux des sociétés en question ?
o Rapport coût / efficacité ? A part la souplesse et la discrétion de ces sociétés, est ce que ces dernières ont véritablement des avantages par rapport à une armée régulière ?
o La question de contrôle est aussi importante, surtout lorsque du personnel est employé en dehors des frontières du pays mandataire. Ce genre de sociétés sont-elles vraiment compatibles avec nos institutions démocratiques ?

J'ai l'impression que ces questions démontrent la limites des prestataires privés. Avez-vous d'autres réponses ??

Publié par Alex le 24 septembre 2007 à 10:01

L'armée privée est à la défense des libertés ce que la fanfare militaire est à la musique!
...un crime!
C'est ce même genre d'armée qui s'appelle Talibans ou gardiens de la révolution...
Seul le marketing et la solde changent...

Publié par A" le 25 septembre 2007 à 0:28

Il n'y a que le crime qui soit criminel.
Louer des professionnels pour faire la guerre, c'est une longue tradition depuis Xénophon. Il serait cocasse qu'en Suisse, on l'ait oublié.

Publié par Hunden le 25 septembre 2007 à 1:32

Une critique fondamentale du mercenariat a déjà été formulée sur un sujet relativement proche. Son auteur (Madimax, MM ?) se reconnaîtra, qu'il veuille bien m'excuser de ne pas le citer nommèment.

Le rôle, la fonction et le statut du soldat n'a rien à voir avec celui du mercenaire dans l'action. Le soldat reçoit des ordres, et celui qui ne sortait pas des tranchées en 14 était abattu sur le champ par l'officier derrière lui. les temps se sont peut-être ramolli, mais dans l'adrénaline de l'action, je doute fort que cela se passe bien pour qui refuse un ordre actuellement...
Le mercenaire lui touche x milliers de dollars par mois. A ce prix-là , on ne va pas mettre trop sa vie en danger. Un peu oui, mais quand ça chauffe, on préférera laisser les copains s'arranger tout seuls. Cette attitude n'est pas compatible avec les exigences d'une armée.

Publié par Roland le 25 septembre 2007 à 11:58

Je prends la suite d'Alex pour insister sur un point : nos sociétés démocratiques ne doivent pas faire la guerre à tout prix.
Je sais que ce type de raisonnement n'est pas forcemment à la mode partout, mais un pays et une armée qui emploient les mêmes armes et les mêmes comportements qu'un groupe terroriste ou un Etat "voyou (pardonnez-moi d'employer cette expression-néologisme qui n'est pas de la meilleure provenance) ne vaut pas mieux qu'eux.


L'évolution positive du monde vient aussi de l'exemple que l'on donne par une pratique respectueuse des principes démocratiques, des populations et de leur ressenti, de la souveraineté de l'Etat qui accueille les troupes sur place, etc. Sans exclure la fermeté bien-sur.
Mais triompher contre le terrorisme en employant la torture, le mépris des populations et en se comportant comme en pays conquis (c'est le cas de le dire pour l'Irak) c'est faire triompher les idées de ceux que l'on combat. la guerre se transforme donc en une simple opération de conquête et de contrôle de territoire.


Certes, l'histoire des milices privées est ancienne, mais est cela qui justifie leur existence ? Et si on se cantonne au cas de Xenophon, si je me souviens bien, ses relations avec la Puissance "employeuse" n'a pas été un chemin de roses...
Comme le dit bien Alex, les mercenaires obéissent en premier lieu à leur employeur, pour l'argent, avec une acceptation très limitée du risque, sans aucun principe ethique (notamment envers la population locale).


Quels sont les risques :
- dégrader l'image de l'Etat employeur dans la zone (c'est déjà fait en irak mais également en afghanistant, voire ailleurs);
- couper la relation entre conflit et la population de l'Etat envoyeur si, à terme, on réduit fortement l'importance de l'armée régulière au profit des mercenaires. Ce qui peut permettre un aventurisme guerrier libre de toute contrainte relatives à l'état de l'opinion publique (et les US sont passés maîtres de cet aventurisme);
- in fine, quel sont nos gages que sur les 50 000 mercenaires en Irak un nombre important ne profitera pas de la situation à son profit : une petite unité dotée d'armement lourd qui se transforme en bande criminelle...?


Pour aller plus loin : plusieurs années dans les Balkans m'ont fait voir la place que les milices (appellées "compagnies de sécurité privées") peuvent occuper dans une société. Là où la police peut être défaillante ou là où les "hommes d'affaires" sont assez riches pour entretenir plusieurs dizaines d'hommes, on voit des types habillés comme les paramilitaires d'Arkan (c'est un exemple), de sinistre mémoire, parfois armés, parfois CAGOULES, se balader dans la rue, surveiller des résidences, des magazins, des chantiers ou attendant un appel d'urgence.
Lors d'une manifestation en Roumanie le mois dernier devant un chantier illégal, il a fallu que ce soit la police qui enlève de malheureux manifestants des pattes de types en treillis (payés par la société qui avait entamé les travaux) qui étaient en train de les tabasser....


je vous le concède, j'extrapole un peu à partir du cas de l'Irak, mais de l'usage à grande échelle des mercenaires dans un conflit (ce qui est déjà un problème en soi) à l'importation de ces pratiques chez nous, il n'y a qu'un pas que la recherche d'économies, la recherche de la facilité et le manque d'envie de la population de se mobiliser pour résoudre ses problèmes amèneront certainement nos sociétés à franchir d'un pas allègre.


Je rappelle que le propre d'un Etat démocratique bien géré est le fait que c'est l'Etat, contrôlé par les citoyens, qui détient le monopole de la violence...

Publié par guy le 25 septembre 2007 à 14:27

...le monopole de la violence légale. Et celle-ci peut parfaitement être sous-traitée aux citoyens eux-mêmes selon les circonstances. Comment expliqueriez-vous autrement la légalité des actes de légitime défense?

Or, à partir du moment où l'Etat accepte de sous-contracter des éléments de son monopole, il n'y a rien qui empêche que ces éléments soient repris par des sociétés privées.

C'est d'ailleurs, très exactement, ce qui se passe partout dans le monde, pas seulement en Irak.

Les Sécuritas suisses seraient-ils donc d'odieux mercenaires bafouant l'autorité étatique?

Publié par Stéphane le 26 septembre 2007 à 10:49

Comparaison n'est pas raison

Peux-t-on vraiment comparer une entreprise comme « Securitas » avec des sociétés de sécurité engagées sur un théâtre extérieur ?

D'une part, à ma connaissance, les cantons et la Confédération ne font certainement que très rarement appel à Securitas. D'autre part, leur rôle et fonction n'est de loin pas le même que ceux de la police.

Enfin, je ne pense pas que l'Etat n'ait jamais recouru aux services de cette entreprise pour défendre ses intérêts à l'étranger. L'action de Securitas est visible par la majorité des citoyens suisses. Il n'y a pas non plus de risque, contrairement au cas américano-irakien, d'avoir une collusion d'intérêt entre l'Etat et cette société privée !

Autrement dit, votre exemple n'est pas des plus pertinents!

Publié par Alex le 26 septembre 2007 à 12:27

"""Enfin, je ne pense pas que l'Etat n'ait jamais recouru aux services de cette entreprise pour défendre ses intérêts à l'étranger."""

Securitas a gardé l'ambassade du Liban à l'époque où c'était chaud et le corps des gardes fortifications a été remplacé par Protectas à l'ambassade d'Alger.

Publié par pan le 26 septembre 2007 à 14:10

Merci pour l'info.

Toutefois, il y a une différence entre une fonction de sécurité liée à une ambassade et le rôle des sociétés privées comme en Irak ou en Afghanistan.

Publié par Alex le 26 septembre 2007 à 16:28

Publié par Alex le 26 septembre 2007 à 16:32

"""Toutefois, il y a une différence entre une fonction de sécurité liée à une ambassade et le rôle des sociétés privées comme en Irak ou en Afghanistan."""
Je suis tout à fait d'accord avec vous (à noter tout de même que les agents Securitas étaient équipés de MP5 à Beyruth si je me souviens bien). Mais justement, je me demande si ces "mercenaires" ne sont pas en réalité occupés à des missions de gardes principalement pour décharger les forces officielles engagées dans des opérations de contre-gurilla. Parler de "vigiles armés", c'est certainement moins vendeur qu'évoquer des "mercenaires" comme les médias et nous-mêmes le faisons sur ce blog. Je n'en ai pas la certitude, mais je suis presque persuadé que la plupart des "contractors" effectuent des missions de garde.

Par ailleurs, nous évoquons systématiquement la sous-traitance de tâches par l'état aux privés, mais je soupçonne également qu'une bonne partie de ces gens sont employés par des compagnies privées soucieuses de protéger leurs employés et leurs biens. Sans elles (et donc sans les "contractors"), la reconstruction se ferait encore bien plus difficilement.

Je ne fais pas ici l'apologie de ces gens, mais je cherche à dessiner les contours du contexte dans lequel ils évoluent. De plus, je pense que Stéphane met le doigt sur un aspect important du problème : la légitimité de l'action elle-même. Si quelqu'un tente de violer mon amie, peu m'importe que celui qui la sauve de son agresseur soit un policier ou un agent de Securitas, et le fait que la Waffen SS puisse être assimilée à une entreprise privée ne constitue pas à mon sens son aspect le plus révoltant.

Publié par pan le 26 septembre 2007 à 21:13

Je suis d'accord avec vous concernant certaines fonctions (vigiles) dévolues aux sociétés de sécurités privées. Toutefois, il y a problème, dès que ces sociétés défendent des intérêts privés, au détriment de la population locale. Plusieurs exemples de ce type ont été relevé en Afghanistan. Les agissements de ces sociétés, qui se comportent comme en territoire conquis, a un impact extrêmement négatif pour la population. Par rapport aux armées nationales, j'ai l'impression que ce genre de troupe est d'abord au service de leur client (payeur) et que l'intérêt local est secondaire.

Au sujet des activités confiées aux sociétés de sécurité, vous devriez lire le lien placé ci-dessus.

Enfin, je ne comprends pas vraiment votre dernière remarque. Il est clair qu'en cas de danger, qu'importe la nature de l'intervenant. La question n'est pas là , mais il faut plutôt savoir comment est assurée la sécurité à long terme, si elle est en conformité avec un contrôle démocratique et si elle indépendante de toute influence financière ou particulière. Dans ce contexte, je comprends encore moins votre référence aux SS ( ???).

Publié par Alex le 27 septembre 2007 à 8:35

La Waffen SS ne dépendait pas de l'état allemand mais du parti et peut donc être assimilée à une entreprise privée. Je voulais souligner qu'à ce niveau d'horreur, ce qui me choque, ce sont bien les massacres perpétrés et non pas le fait que leurs auteurs ne soient pas des militaires ou des policiers officiels, par opposition à mon autre exemple. Voilà le sens de mon allusion. J'ai lu votre lien avec intérêt et vous en remercie.

Je crois que, sur l'essentiel, nous sommes d'accord.

Si ces entreprises se comportent mal, les troupes d'occupation américaines ne sont pas exemplaires non plus (en attestent les divers scandales médiatiques ainsi que les stupides vidéos de soldats us sur youtube) et je ne sais pas trop qui nuit le plus à l'image des occidentaux sur place. Cependant, je crois que le problème des "contractors" se règle assez facilement si, comme Blackwater, ils scient la branche sur laquelle ils sont assis et se comportent d'une manière telle qu'ils se font exclure par l'échelon politique ou qu'ils perdent leur clients soucieux de garder une certaine image de marque dans le pays.

J'aimerais bien savoir quelle proportion d'entre eux accomplit des missions de garde ou de surveillance et quelle est la part du secteur public dans leur clientèle.

Publié par pan le 27 septembre 2007 à 9:14

... Ces chiffres existent (car en matière de statistiques les Américains ne cachent pas la m. au chat), une bonne recherche google devrait vous les fournir.

"quelle proportion d'entre eux accomplit des missions de garde ou de surveillance"

C'est la seule activité directe de ces entreprises en matière de sécurité, le reste consistant en formation, logistique et conseil.

Quoi qu' il en soit une immense majorité de ces contrats proviennent, d' une manière ou d' une autre, de l' état Américain. En immense majorité il s' agit de protéger la reconstruction de l' Iraq : sites / convois / personnes, en employant un maximum de locaux, question de coûts. Voilà qui devrait répondre à vos interrogations sur les intérêts des locaux VS les intérêts individuels, Alex. Oh miracle, c' est - en gros - une solution gagnant-gagnant, donc elle dérange les éternels rêveurs d' un monde meilleur à cause de son amoralité - ou du moins son non conformisme.

Un dernier point (puis je me tairai) :

Les interventions ci-dessus montrent bien à quel point le sujet dérange pour motifs irrationnels. Quelques éléments :

1) Le salaire, absolument mérité, impliquant une jalousie folle des militaires, eux-mêmes traités comme des chiens depuis toujours et partout.

2) L' emploi de l' arme d' épaule provoque un réflexe de Pavlov du public : "avec un Glock 17 c' est un agent de sécurité, avec un MP5 c' est un mercenaire". Bravo pour la vue d' ensemble, c' est typiquement ce que l' on entend partout en France...

3) "il y a une différence entre une fonction de sécurité liée à une ambassade et le rôle des sociétés privées comme en Irak ou en Afghanistan"
Outre la clientèle, tout est pareil : procédures, règles d' engagement, contrats...

4) Et pour finir l' emploi abusif du mot "contractor" depuis que RAIDS a ainsi titré un hors série. Pour info "contractor" désigne une entreprise qui passe un contrat avec l' état (pour déblayer le WTC, cuire des merguez, planter les choux ou protéger un ambassadeur avec plein de vilaines armes).

Publié par Luc B le 29 septembre 2007 à 15:38

A monsieur Monenerat

Sorti du site Foregin Affairs pour étoffer votre analyse.

Bà v

The private security firm Blackwater has come under intense scrutiny
after a September 16 shootout that left at least 11 Iraqi civilians dead.
Iraqi Prime Minister Nouri al-Maliki has demanded that Blackwater
cease operating in Iraq and Congress is raising questions about the
accountability of the 160,000 private military contractors working there, a
force that exceeds the number of uniformed soldiers in the country. In
his article "Outsourcing War" (March/April 2005) Peter W. Singer argued
that the privatization of war without oversight may be expedient but it
is not good for democracy. In a new Brookings Institution study, Singer
concludes that the use of private military contractors appears to have
harmed, rather than helped, U.S. counterinsurgency efforts in Iraq.

* "Outsourcing War", Foreign Affairs (March/April 2005):
http://m1e.net/c?71965384-zoRnPA.oMJ54o%402797670-NGwX8WefhRuMg

* "Can't Win with 'Em, Can't Go To War without 'Em", Brookings
Institution (September 2007) (PDF):
http://m1e.net/c?71965384-ZRSZjVZIZRNv2%402797671-Jan8PrCu1876k

Publié par raph le 3 octobre 2007 à 9:55