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12 mai 2005

Une adaptation de l'armée

Le Conseil fédéral a présenté aujourd'hui son optimisation de la réforme de l'armée, basée sur une spécialisation des troupes entre des forces de défense, chargées de maintenir le savoir-faire du combat de haute intensité, et des forces de sécurité, axées sur les engagements en-dessous du seuil traditionnel de la guerre. Cette optimisation ne produira que des économies marginales en soi (39 millions par an), même si la concentration de plusieurs infrastructures logistique permettra d'économiser 130 millions supplémentaires chaque année. En d'autres termes, la pression financière constante imposée à l'armée et les obstacles placés sur ses programmes d'armements continueront d'entraver son adaptation.

Cette spécialisation de l'armée n'en constitue pas moins une décision stratégique importante, et parfaitement en accord avec l'évolution de notre environnement. Le rôle concret de la plupart des contingents militaires déployés aujourd'hui de par le monde consiste non pas à détruire un adversaire clairement identifié, mais bien à interdire ou à garantir la normalité d'un espace défini. La notion classique de défense territoriale perd en importance au fur et à mesure que les capacités de conquête territoriale s'amenuisent au sein des armées. En revanche, la préservation et le rétablissement des conditions d'existence face au chaos et à la violence politique extrême prennent une importance croissante, indépendamment des frontières nationales.

L'une des grandes innovations de l'Armée XXI, que les commentateurs hélas ont tendance à largement sous-estimer, est le concept d'opération préventive de sûreté sectorielle. Il est défini (pratique d'avoir le règlement à portée de main...) comme un "type d'opération visant à garantir la capacité de conduite et de fonctionnement civile et militaire ainsi que le contrôle du territoire en cas de menace asymétrique. L'armée répond de la conduite et de l'engagement." En d'autres termes, il s'agit d'une mise en service actif d'une partie de l'armée afin de protéger durablement des personnes, des troupes, des installations ou des secteurs face à des actes terroristes, criminels ou extrémistes. C'est-à -dire face aux menaces principales d'aujourd'hui et de demain.

Cette aptitude à prendre la responsabilité de pans entiers du pays (on pourrait parler de militarisation) est largement unique à la Suisse. Les autres pays européens n'ont que rarement les bases légales et la culture politique pour envisager des mesures de ce type ; certaines armées sont même interdites de mission indépendante sur leur propre sol. De même, la flexibilité du système suisse permet de concevoir des engagements subsidiaires (sous la conduite des autorités civiles, comme le World Economic Forum) en parallèle d'engagements de sûreté sectorielle, c'est-à -dire d'adopter des réponses différenciées et adaptées à la menace. L'optimisation de l'armée annoncée aujourd'hui renforce cette perspective.

Publié par Ludovic Monnerat le 12 mai 2005 à 15:14

Commentaires

« Le Conseil fédéral a pris acte que ces économies ne suffisent pas à atteindre les objectifs fixés par le PAB 04 pour le DDPS. En conséquence, quelque 145 millions d'économies supplémentaires devront être obtenues au détriment des investissements. Si elle perdure, une telle situation ne manquera pas, à terme, de déboucher sur un réexamen des paramètres de base que sont les missions de l'armée, ses effectifs ou encore son niveau technologique. »


L'aspect le plus dérangeant concerne la conclusion du message transmis par le Conseil fédéral. Il semble que ce soit une adaptation à court terme qui sous-entend déjà de futures modifications (notamment au niveau des effectifs, du matériel ou des infrastructures). Ca donne l'impression d'avoir affaire à une équipe obligée de naviguer à vue!
D'autre part, l'état des finances fédérales et les pressions des différents partis ne manqueront pas de remettre certains sujets sur le tapis!

Suis curieux de connaître l'avis d'autres personnes.

Salutations

Alex

Publié par Alex le 12 mai 2005 à 16:48

En France, le plan "Vigipirate" ou les forces armées donnent au coup de mains aux forces de police tant à passer de plan exceptionel en temp de crise à une situation habituelle dans le temps.

Il est devenue normale de voir des militaires armées dans les aéroports ou les gares et l'on ny fait méme plus attention.

Je me pose tout de méme des questions.

Il y 20 ans, on voyer cela seulement en Afrique, dans les régimes sud américains ou les dictatures militaires.

Dans quelle monde vit on ou dans des pays dit "devellopé" et pacifique nous soyons obligé de faire appel aux forces armées pour de simples missions de maintien de l'ordre ?

Publié par Frédéric le 12 mai 2005 à 22:13

Peut-être un simple rappelle pour nous dire et dire que nous sommes " en guerre ". Au Canada on ne voit des militaires que dans les arénas quand ils rentrent de mission à l'étranger :-)

Publié par Yves-Marie SENAMAUD le 12 mai 2005 à 23:41

Je suis d'accord avec Alex.
On a l'impression qu'a peine le projet dévoilé, il sera inabouti pour des raisons de manques de ressources financières.
Cette transformation ambitieuse risque donc de se limiter à une réduction d'effectif qu'on aura soigneusement embalé avec des soi-disant
repositionnements strategiques.



Publié par crys le 13 mai 2005 à 0:19

Alex et Crys ont raison.

Ce n'est pas la mission qui détermine le budget, mais bel et bien le budget qui sert de stimulant à l'imagination du conseil fédéral pour inventer une mission. C'est complètement absurde, et je ne saurais dire si les âneries du conseil fédéral à ce sujet discréditent d'avantage l'armée ou le gouvernement lui-même!

Depuis AXXI, chaque service me reconfronte à mes convictions concernant notre armée de milice, et j'avoue que je doute chaque fois d'avantage, à mesure que l'armée semble abandonner les principes que j'ai voulu porter et défendre à travers elle.

L'armée doit être capable de changer de forme pour s'adapter à l'environnement du moment, mais elle ne peut pas renoncer aux valeurs qu'elle a représenter pour des générations de soldats, lesquelles valeurs constituent finalement sa seule substance morale.

Cette nouvelle farce du conseil fédéral me désole, le silence de nos généraux m'inspire de la pitié, et je me demande comment aborder le prochain service, alors que la réalité morale de l'armée s'éloigne toujours d'avantage de l'institution pour laquelle j'ai un jour choisi de donner plus de temps que la moyenne.

Publié par Ruben le 13 mai 2005 à 2:44

"... valeurs qu'elle a représenté..."
Désolé pour la coquille.

Publié par Ruben le 13 mai 2005 à 2:49