« Les langues de l'OTAN | Accueil | Au pied du tremplin »

31 mai 2005

La planification opérative

Ce matin, mon groupe a eu le privilège de présenter un briefing de 45 minutes au général 4 étoiles qui accompagne le cours, consacré à l'analyse de la mission (ce que l'on appelle orientation dans le langage OTAN, et qui se rapproche de l'appréhension du problème dans la doctrine suisse tout en étant plus complète et plus complexe). L'un des points essentiels de la présentation, mis à part l'énoncé de la mission (dans l'Alliance, ce sont les formations qui énoncent leur mission en fonction des tâches reçues), était la conception opérative, ce dont je me suis largement chargé : l'articulation de toute l'action en phases, le long de lignes d'opération visant à atteindre successivement les points décisifs - c'est-à -dire des conditions précises qui nécessitent des efforts - en vue de préserver notre centre de gravité, de neutraliser celui des parties adverses, et donc d'obtenir l'état final attendu.

Concrètement, la composante terrestre de notre force de maintien de la paix avait 4 lignes d'opération différentes : consolidation (des mesures de sécurité établies), dissuasion (des parties adverses ou des adversaires potentiels), normalisation (des conditions d'existence) et information (des différentes audiences-cibles). Ce découpage permet d'articuler dans le temps des fonctions essentielles, et ainsi de distinguer plus facilement les tâches devant être accomplies dans chaque phase de l'opération. Lorsque l'on doit planifier l'emploi de plusieurs composantes, on utilise plus volontiers des lignes d'opérations liées aux effets de celles-ci (opérations terrestres, aériennes, maritimes, spéciales et psychologiques dans la terminologie OTAN). Enfin, lorsqu'une formation militaire doit assumer une fonction stratégique (c'est le cas de la coalition en Irak, par exemple), c'est le système DIME qui est retenu pour les lignes d'opérations : Diplomatie, Information, Militaire et Economie.

Après avoir reçu les directives du général - jouant le rôle du commandant de la ZFOR - pour la planification, nous avons passé l'après-midi à établir plusieurs déroulements différents pour l'action, qui consiste à déployer en 2 mois environ l'équivalent de 5 brigades de manœuvre dans un secteur d'engagement mesurant à peu près 800 km sur 1000. Ces variantes, qui se distinguent notamment par l'articulation dans l'espace, la structure de commandement ainsi que par le mouvement des forces, seront ensuite affinées par différentes analyses et évaluées par le biais du jeu de guerre. Rien de bien nouveau à ce sujet par rapport à la doctrine de commandement suisse, si ce n'est bien entendu l'ampleur de l'opération et le nombre de tâches qu'elle implique, entre la sécurisation des points de débarquement aériens et maritimes, l'établissement d'une zone démilitarisée, la réouverture des lignes de communication, l'isolement des tribus fanatisées refusant de rendre les armes, l'appui dans le rapatriement des réfugiés, l'implémentation de l'accord de paix, la formation des troupes gouvernementales ou encore l'appui au TPI pour l'arrestation de criminels de guerre présumés!

L'une des grandes qualités de cette formation réside ainsi dans le réalisme des activités : les éléments intégrés dans la planification peuvent à tout instant être rapportés à ce qui s'est fait en Bosnie, au Kosovo et en Afghanistan, voire en Irak, et correspondent parfaitement à la fonction des armées modernes - restaurer ou préserver la normalité de zones déterminées. En même temps, appréhender toute la complexité de plusieurs collectivités plus ou moins antagonistes ne peut se faire en l'espace de 3 semaines, et le fait de passer rapidement sur certains facteurs humains génère une certaine frustration. Rien ne remplace la réalité.

Publié par Ludovic Monnerat le 31 mai 2005 à 18:29

Commentaires

A voir l'ampleur de la tâche, on espère quand même qu'il y a des ordinateurs pour vous aider?

Publié par François Guillaumat le 1 juin 2005 à 7:36

Vous pouvez rajouter la Cote d'Ivoire dans votre liste d'exemples, un massacre à eu lieu dans une zone théoriquement sous controle des forces internationales mais celle ci ont été prévenu trop tard...

Je suggére d'intégrer dans la liste des propositions dans un tel cas de figure l'octroi de moyens de communications dans chaque localités pour que ceux ci puisse demander de l'aide en cas de besoin ainsi qu'un moins un groupe d'assaut héliporté en stand by capable d'intervenir rapidement.

Publié par Frédéric le 2 juin 2005 à 15:09