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23 septembre 2005

Terre, mer et air

Les rivalités interforces - ou interarmées - restent une chose difficile à appréhender de l'extérieur. A priori, les militaires devraient en effet former une confrérie, ou à tout le moins une organisation favorisant la camaraderie, et non se livrer à des luttes intestines parfois désastreuses, avec des services prêts à tirer des ficelles politiques pour défendre leurs intérêts sectoriels. De telles rivalités existent cependant dans toutes les armées, et les structures multinationales n'y échappent pas ; la Suisse constitue d'ailleurs à cet égard une exception : la faiblesse de la composante maritime - nos bateaux patrouilleurs sont issus du génie - limite à deux le nombre de forces, et donc une grande partie des tensions. Celles-ci existent néanmoins. Il suffit qu'un officier de l'infanterie visite une installation des Forces aériennes pour s'étonner des différences frappantes dont elle témoigne en termes de qualité de vie !

Ce matin, dans notre cours, nous avons cependant eu droit à une illustration frappante de ces rivalités, puisque les trois composantes classiques de la CJTF - terre, mer et air - ont été présentées dans cet ordre par des officiers norvégiens qui en sont issus. Bien entendu, ceux-ci ont chacun mené une opération de séduction couplée à un dénigrement, explicite ou non, des autres services.

Un major de la composante terrestre - incorporé dans l'Allied Rapid Reaction Corps - a commencé son exposé par un slide show de l'opération en Afghanistan, avec le morceau « Road to Hell » de Chris Rea sur les hauts-parleurs de la salle ; il s'est ensuite lancé dans une description précise et concrète des actions menées au sol, en mettant notamment l'accent sur le concept d'opérations basées sur les effets, qui est implémenté par l'ARRC, et en démontrant par là que les méthodes traditionnelles de planification étaient outrageusement dépassées.

Un capitaine de la composante navale - un grade équivalent à celui de colonel, et il s'agissait en fait du chef opérations de la marine norvégienne - a ensuite fait un tour d'horizon enthousiaste des flottes portant de près ou de loin la bannière de l'OTAN. Il a ainsi montré, à juste titre, que seuls les moyens maritimes permettent aujourd'hui à l'Alliance de déployer l'état-major d'une CJTF. Mais il a également souligné que sa composante possède des éléments terrestres et aériens, et que somme toute les effets interforces n'étaient si indispensables que cela.

Enfin, un lieutenant-colonel de la composante aérienne a entamé son exposé par quelques slides hyperchargés sur la grande stratégie, sur les principes fondamentaux qui la régissent, en appelant Beaufre et Luttwak à la rescousse, avant d'en venir au fait et de décrire l'arme aérienne comme étant la mieux à même de concrétiser le tout. Il a même illustré certains éléments avec un fleuret qu'il possède, peut-être en référence à André Beaufre, et plus sûrement parce que le général de l'aviation suédoise présent dans la salle pratique l'escrime.

Les rivalités sont inévitables dans les armées. Il s'agit simplement de faire en sorte que leurs effets restent maîtrisés, et que l'inertie structurelle n'entrave pas trop la pensée.

Publié par Ludovic Monnerat le 23 septembre 2005 à 22:58

Commentaires

on peut aussi voir l'origine de ces rivalités dans l'esprit de competition, qui règnent dans une unité. Actuellement il est difficile de ce mesurrer à un adversaire valable (pas vraiment d'ennemi) donc logiquement cela se reporte sur les forces voisines.

Publié par t-Buster le 24 septembre 2005 à 16:23

A noter que méme si les 3 armes sont réunit sous un méme commandement comme au Canada et en Belgique, ses rivalitées interservices subsite ;)

Publié par Frédéric le 25 septembre 2005 à 16:19