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27 avril 2005

La méthode du wargaming

WargameSRC.jpg

Le jeu de guerre est une étape importante de toute planification militaire. Plus connu sous le nom de wargaming dans la terminologie OTAN, il constitue un succédané du kriegspiel pratiqué voici déjà deux siècles par l'état-major général prussien ; les états-majors le pratiquent aujourd'hui sur une base régulière pour l'évaluation et la synchronisation des variantes élaborées pour l'emploi des forces. Introduit dans la doctrine de l'armée suisse par la réforme Armée XXI, le jeu de guerre met en évidence les frictions, les risques, les lacunes et les contradictions inhérentes à une possible décision. Il peut également permettre d'égaliser les connaissances au sein des officiers d'état-major et des commandants, et de cerner les interfaces critiques pour le succès d'une action appelée à être mise en œuvre, dans un milieu permissif ou non.

C'est dans cette perspective de synchronisation que l'état-major du Swiss Raid Commando a effectué aujourd'hui son jeu de guerre pendant environ 10 heures (voir photo ci-dessus) ; ayant eu le privilège de diriger cette activité, je suis assez bien placé pour en décrire la méthode. Le SRC mobilise plus de 3000 militaires sur une durée totale de 10 jours, et nécessite de ce fait une coordination très étroite entre les 5 cellules de son état-major (opérations, logistique, tâches territoriales, conduite et information). De ce fait, devant la presque totalité de l'état-major, chaque journée et chaque activité ont été passées en revue de manière détaillée, avec une description précise des effets attendus dans l'espace et dans le temps. Une carte géante du secteur d'engagement (plastifiée afin de permettre d'y circuler librement), des tableaux récapitulatifs et une projection sur écran des points en suspens complètent le dispositif.

L'originalité du jeu de guerre, notamment pour ceux qui s'accrochent à de vieux préjugés sur la conduite militaire, est le fait que chaque membre de l'état-major a le droit de prendre la parole en plénum et d'exposer un point de vue, de proposer une solution, de transmettre une information ou de poser une question. Ils sont même vivement encouragés à faire preuve de sens critique, à vérifier les dires prononcés et à mettre le doigt sur des problèmes ignorés. Il s'agit naturellement de trouver un équilibre entre vaines arguties et raisonnements fondés, comme entre points de détail et vue d'ensemble, mais c'est avant tout la mise en commun du savoir qui fonde la démarche. Une telle activité est d'ailleurs une occasion unique pour les officiers spécialisés dans un domaine d'apercevoir les activités qui se déroulement parallèlement aux leurs, et ainsi de gagner une perspective centrée sur les interactions.

Ce jeu de guerre s'est révélé très productif. Malgré ces longues heures passées dans la halle à usages multiples de la place d'armes de Bure, qui plus est par une température franchement glaciale, un grand nombre de points à corriger et à améliorer ont été recensés, évalués et promptement transformés en missions. C'est la meilleure recette pour assurer aux plans une qualité suffisante. Tout en sachant que les hasards et les imprévus de l'engagement imposent toujours en phase de conduite de grandes qualités d'imagination et d'adaptation !

Publié par Ludovic Monnerat le 27 avril 2005 à 20:35

Commentaires

Quelle systéme utiliser vous ? Le Linux ?

Publié par Frédéric le 28 avril 2005 à 12:50

(!) chaque membre de l'état-major a le droit de prendre la parole en plénum et d'exposer un point de vue, de proposer une solution, de transmettre une information ou de poser une question. Ils sont même vivement encouragés à faire preuve de sens critique!

« Cool ! »
La méthode participative possède de nombreux avantages, comme l'échange et la confrontation des points de vue, la créativité ou une meilleure identification du personnel par rapport au projet développé.
Toutefois, (je ne parle pas forcément de l'armée) ce sont encore trop souvent des exercices alibis permettant à chacun de s'exprimer, mais ne visant pas à intégrer les remarques ou solutions proposées (parce qu'une décision a déjà été arrêtée). Dans ce cas, ce genre d'exercice provoquera certainement plus de frustration que de satisfaction.

Salutations

Alex

Publié par Alex le 28 avril 2005 à 12:52

" (parce qu'une décision a déjà été arrêtée) "

Par qui?

Big Brother, les comploteurs internationaux, le pouvoir de l'argent!

Publié par Yves-Marie SENAMAUD le 28 avril 2005 à 16:48

Par les créateurs de l'exercice ;)

Je ne connait pas d'exercices d'état major ou c'est le plastron qui gagnent :)

Publié par Frédéric le 28 avril 2005 à 18:58

Big Brother, les comploteurs internationaux, le pouvoir de l'argent!

Voyons Monsieur Senamaud, vous n'y êtes pas du tout ! Il s'agit de Raël et de ses fidèles. Autrement dit de ces êtres supérieurs qui téléguident une poignée d'humains pour causer la perte de l'humanité. Je vous le dis : il est encore temps de réagir!

Sinon ils finiront de downloder nos cerveaux dans des cochons et autres animaux de la ferme!

Bien à vous

Alex

Publié par Alex le 29 avril 2005 à 12:50

Nous avons le privilège d'avoir Raël au Québec ainsi que d'autres gourou du genre :-)))))

Plus sérieusement je viens de lire encore un article du Monde pour le moins tendancieux et bien éloigné de l'étude de " Doctrine " qui me parait bien faite et très soucieuse d'exposer les faits. Le dernier paragraphe de l'avant-propos rejoint le sentiment que nous semblons partager sur cette tribune.

" Doctrine " Numéro spécial consacré aux enseignements de vingt mois (mai 2003 - décembre 2004) d'opérations de stabilisation en Irak :

http://www.cdes.terre.defense.gouv.fr/default.htm

Les militaires français dressent un bilan critique de trente mois d'opérations américaines en Irak :

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3218,36-644552@51-628964,0.html

Publié par Yves-Marie SENAMAUD le 29 avril 2005 à 14:38

Pour en revenir à la réflexion d'Alex sur la méthode participative, quelques précisions sont nécessaires sur le wargaming. Lorsqu'un état-major comptant plus de 70 officiers et sous-officiers passe en revue la planification détaillée d'une opération, il est clair que la variante opérationnelle a déjà été approuvée longtemps auparavant, et que par conséquent l'exercice vise à faciliter sa mise en oeuvre. Tous les avis pertinents sont les bienvenus s'ils augmentent la connaissance de tous. Les décisions subséquentes sont soit prises par le commandant en direct (dans le cas présent, le chef d'état-major), soit élaborées par des petits groupes rassemblant les intervenants sur le sujet puis approuvées ou non par le commandant. En définitive, c'est l'officier qui porte la responsabilité opérationnelle qui tranche.

Publié par Ludovic Monnerat le 30 avril 2005 à 10:50

Ouf ! je suis soulagé que ce ne soit pas Raël :)))

Publié par Yves-Marie SENAMAUD le 30 avril 2005 à 16:54