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18 décembre 2004

L'Iran dans la ligne de mire

D'après la dernière édition du magazine Atlantic Monthly, citée par World Net Daily, le Pentagone a récemment effectué des simulations d'une attaque américaine des installations nucléaires de l'Iran, avec des jeux de guerre qui comprenaient également une invasion terrestre. L'opération projetée serait ainsi articulée en trois phases : frappes aériennes sur les éléments de commandement de Téhéran, et notamment les bases des Gardes de la Révolution ; frappes aériennes sur les sites liés aux programmes nucléaires et missiliers iraniens, mais aussi biologiques et chimiques ; puis offensive terrestre visant à opérer un changement de régime.

Cette annonce ne doit pas être confondue avec une décision stratégique : des jeux de guerre impliquant des membres du Département de la Défense, du Département d'Etat et des services de renseignements sont pratiqués toute l'année aux Etats-Unis. Ils visent autant à vérifier des concepts d'opération qu'à entraîner les responsables probables de telles actions. De plus, les tentatives de la communauté internationale en vue de suspendre durablement le programme nucléaire iranien peuvent expliquer la publicité donnée à ces simulations. La pression exercée sur Téhéran implique nécessairement une forte dose de dissuasion.

Malgré cela, ce scénario rappelle un élément important : contrairement à une opinion assez répandue, les Forces armées américaines conservent une liberté d'action stratégique suffisante pour mener des offensives aéroterrestres de grande ampleur, en dépit de leur engagement majeur en Irak (150'000 hommes). Le Pentagone a parfaitement la possibilité de déployer les 4 à 6 porte-avions, les 500 à 800 avions de combat et d'appui, et les 75'000 à 120'000 hommes nécessaires pour abattre le régime des ayatollahs et mettre un terme à la révolution islamiste de 1979. Si l'Iran n'est pas l'Irak, aucune armée ne peut actuellement vaincre l'armada US.

Mais la victoire militaire n'est qu'une composante des succès stratégiques, et la chute des ayatollahs pourrait bien provoquer en Iran un chaos à côté duquel le triangle sunnite irakien passerait pour une zone d'entraînement. Envahir l'Afghanistan pour renverser les Taliban et en faire un pays stable et démocratique était un projet ambitieux, et pourtant en bonne voie ; envahir l'Irak pour renverser Saddam Hussein et en faire un pays stable et démocratique était un projet plus ambitieux encore, et néanmoins en train de se concrétiser pour la majorité des Irakiens. En revanche, appliquer la même méthode et les mêmes moyens en Iran semble certainement voué à l'échec.

Pourquoi le Pentagone envisage-t-il pourtant une opération de ce type ? En mettant de côté les éléments de dissuasion et de déception, on peut penser que le Département de la Défense veut fournir des options stratégiques au Gouvernement, ou du moins des réponses quant à leur faisabilité. Toutefois, il est également possible que l'offensive militaire soit la seule option valable aux yeux de la Maison-Blanche. La duplicité de Téhéran face à l'ONU et son ardeur à développer son arsenal non conventionnel suggèrent qu'une guerre apparaît inévitable aux yeux de Washington, compte tenu de son projet au Moyen-Orient, et que prendre les devants s'impose.

Ce d'autant plus qu'Israël est prêt à agir. Les Israéliens voient aujourd'hui l'Iran comme leur principale menace, et la perspective de perdre le monopole nucléaire dans la région leur fait craindre un effondrement de l'équilibre stratégique existant depuis 30 ans. Ils définissent ainsi un « point de non retour », soit l'enrichissement de l'uranium à qualité militaire, et ne dissimulent pas leur détermination à utiliser tous les moyens disponibles pour empêcher Téhéran de l'atteindre. Ils n'ignorent pas que l'option militaire ne connaît pas d'intermédiaire entre le succès et le désastre, et ne cachent pas cette réalité à leurs alliés américains - au risque de leur forcer la main!

Il paraît intéressant de relever que les missiles iraniens susceptibles de porter une charge nucléaire pourront fort bien, dans un proche avenir, atteindre la moitié de l'Europe, une bonne partie de la Russie et même la Chine ou l'Inde. Le problème de l'Iran nous concerne aussi.

Publié par Ludovic Monnerat le 18 décembre 2004 à 23:50

Commentaires

Je me permet de vous mettre l'adresse de deux vidéos intéressantes sur les derniéres maneuvres Iraniennes.
Malgré l'aspect propagande, il montre bien l'autonomie de l'industrie d'armements Iranienne qui parvient à ce que leurs "chinook" soient opérationels malgré les 25 ans d'embargo officiel :
http://www.iribnews.ir/video/01/09/12/d0431.wmv
http://www.iribnews.ir/video/01/09/12/s408.wmv

Publié par Frédéric le 22 décembre 2004 à 16:48

La tension ne baisse pas, l'effet de surprise risque de ne pas fonctionner en cas d'attaques aériennes :

Iran: plus de dix espions nucléaires travaillant pour les USA et Israël arrêtés
AFP - 22.12.2004, 16:22

Le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères Hamid Reza Assefi, le 28 novembre 2004 à Téhéran. Photo: Behrouz Mehri (AFP/Archives)

TEHERAN (AFP) - Une dizaine de personnes ont été arrêtées au cours des derniers mois pour avoir espionné les activités nucléaires iraniennes au profit des services de renseignement américains et israéliens mais aussi pour avoir proposé de vendre à l'Iran une bombe atomique, a déclaré mercredi un ministre iranien.

"Plus de dix espions nucléaires ont été arrêtés au cours de cette année", a déclaré le ministre iranien des Renseignements Ali Younessi, cité par l'agence officielle Irna.

"Ils travaillaient pour le Mossad et la CIA et ont été arrêtés à Téhéran et à Hormozgan (sud)", a-t-il ajouté.

Certains d'entre eux, peut-être trois, "travaillaient pour l'Organisation iranienne de l'énergie atomique et les autres étaient de profession libérale", a-t-il dit.

"Ils ont été remis au tribunal révolutionnaire et leur identité ne sera pas révélée avant le début de leur procès", a-t-il dit.

M. Younessi a révélé que ses services avaient arrêté des "espions qui avaient été envoyés par les Américains et les Israéliens pour proposer de vendre à l'Iran une bombe atomique ou de l'uranium" pour piéger l'Iran.

Il a également déclaré qu'avant l'arrestation d'un directeur de rang moyen de l'industrie nucléaire, qui "avait fourni des informations aux Américains" lors de voyages à l'étranger, les Renseignements iraniens l'avait "utilisé pour donner de fausses informations aux Américains" afin de les tromper.

Il a aussi ajouté que "certains espions avaient reçu l'ordre de contaminer les sites nucléaires. Il suffit de toucher un élément d'un site nucléaire avec un mouchoir contaminé pour ensuite prétendre qu'il y a eu enrichissement" d'uranium à cet endroit.

Les inspecteurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) ont découvert un degré de contamination très élevé dans certains sites nucléaires. Les Iraniens ont toujours affirmé que cette contamination provenait de matériels de seconde main importés de l'étranger.

En août, M. Younessi avait annoncé l'arrestation d'un "certain nombre d'espions qui transmettaient à l'étranger des informations sur le programme nucléaire iranien".

Il avait ajouté que "les +hypocrites+ (l'appellation donnée aux Moudjahidine du peuple, organisation d'opposition au régime islamique en exil) ont pris la plus grande part au transfert des informations". "Par le passé, ils se sont même glorifiés d'avoir fait de l'espionnage contre l'Iran et, lors d'une conférence de presse aux Etats-Unis, ils se sont vantés d'avoir fourni des renseignements aux Américains et à d'autres", avait-il précisé.

En juillet 2000, la justice iranienne avaient condamné à des peines de prison dix juifs et deux musulmans accusés d'espionnage pour Israël qui ont finalement été libérés en 2003.

Pour sa part, le général Mohammad Salimi, le commandant en chef de l'armée iranienne, a affirmé que les forces armées iraniennes avaient reçu l'ordre de se préparer pour défendre les sites nucléaires iraniens contre toute attaque.

"L'armée de l'air a reçu instruction de protéger avec toutes ses forces les sites nucléaires iraniens", a déclaré le général Salimi, cité par le quotidien gouvernemental Iran.

"L'armée de l'air a suspendu toutes ses manoeuvres pour un temps et a concentré ses moyens sur les patrouilles de combat dans le ciel", a-t-il ajouté.

Le général répondait à une question sur des informations de presse concernant une simulation d'attaque par des forces ennemies contre la centrale nucléaire de Bouchehr, actuellement en construction par les Russes dans le sud du pays.

Ces derniers mois, des journaux israéliens, américains et arabes ont publié des informations sur une éventuelle attaque américaine et israélienne contre les sites nucléaires iraniens.

Les responsables américains et israéliens ont toutefois démenti l'existence d'un plan d'attaque contre l'Iran.

Publié par Frédéric le 22 décembre 2004 à 21:21

Les installations nucléaires iraniennes dans tout le pays sont survolées par de mystérieux OVNIS volant à très basse altitude ...
Bien évidemment, le pouvoir en place les accuse d'être de nationalité US, et a ordonné à son aviation de les abattre, mais celle-ci déclare ne pas avoir les compétences techniques pour s'acquitter de la besogne.

Bientôt des pilotes extra-terrestres otages en Iran ?

http://216.132.172.10/indiadaily/editorial/12-26a-04.asp

Publié par Frédéric le 28 décembre 2004 à 18:29

Tiens, vous ne croyez donc pas à l'existence d'un courant réformateur puissant, dans la jeunesse et les élites iraniennes, qui appellerait de ses voeux une telle intervention et serait prête à prendre la relève?

Publié par François Brutsch le 29 décembre 2004 à 12:29

Si, je crois à l'existence d'un tel courant, mais je pense qu'une intervention militaire américaine en Iran serait vraiment au-delà des capacités actuelles du Pentagone, et obligerait à dégarnir complètement le Pacifique ou à réduire considérablement les missions en Afghanistan (difficile) et en Irak (encore plus difficile avant 2006).

En même temps, il est exact que l'existence d'élites pro-démocratiques est une des grandes différentes entre Iran et Irak...

Publié par Ludovic Monnerat le 29 décembre 2004 à 14:59